L’hygiène brillait dans tous ses livres d’école. La propreté est la meilleure condition de la
moralité. Celui des sciences, de lecture, de morale. Comment une âme délicate et noble pourrait-elle habiter un corps sale
et négligé ? Maman récurait l’émail de ses patrons, rue des
Gentilshommes. La malpropreté sépare les
hommes plus que ne fait l’inégalité des fortunes. Sur sa table de toilette,
la fine Sarreguemines fleurie de sa cuvette et son broc de mariage.
Le
jour de son Certificat d’Études Primaires, elle avait dû longuement se pencher
sur une baignoire mesurant 70cm de large,
1m30 de long, et 70cm de profondeur dont il fallait résoudre le temps de
remplissage sachant que le robinet débitait
70 litres
par minute. Notre bassine de zinc faisait 80cm de diamètre. On disait la baillotte
qui servait aussi pour la lessive. Je remuais dedans comme un hanneton dans
une tasse.
Le
dimanche matin papa la déposait dans l’arrière-cuisine. Pour le petit paquet de linge sale. Maman avait sorti des habits
propres de la lavande. C’était le jour de la
toilette en grand. Le reste de la semaine la propreté s’arrêtait au cou.
Débarbouillage de chat. Que recouvrait en
grand pour eux ? Les corps étaient soustraits. Le nu honteux. Elle ne
s’attardait pas sur mon jésus. Dieu
prenait certaines parties avec des pincettes.
Je
tournais sous la caresse savonneuse du gant. Sur l’eau vite refroidie elle
inclinait le bec de la bouilloire saisie sur le rond rougi de la cuisinière à
charbon. Je dansais un peu. Je sortais comme
un sou neuf tremblotant dans la serviette, décrassé pour la grand-messe. La
maison a été agrandie d’une salle d’eau l’année de mon certificat d’études et
son récurrent problème de baignoire qui, en plus pour moi, fuyait.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Un commentaire ?