dimanche 6 octobre 2013

J’ai 11 ans / 6 /




Maman va sur ses 38 ans quand je perce ce gros ventre dont elle a honte devant ses copines . Sur un cri étouffé. Rien d’un cuivre chanteclair. Un pauvre pépiement de poussin. Visiblement je ne prise guère la douceur de l’air printanier de ce midi d’avril. Je boude quoi, fais le bec sur le téton maternel. A peine pondu que gavé. Sans doute déjà réfractaire à ce prime recrutement incontrôlé, cette croisade chromosomique. Je perçois bien, malgré l’accueil joyeux de mes sœur et frère, que même larve, j’ajoute mon petit fardeau à la balance familiale.
Poids et taille au degré zéro d’une courbe dont l’ombilic sera mon Everest dans une longue course solitaire et époumonée, je suis le fruit tombé des saintes entrailles. Maman, dans cette époque de loterie foetale, choisissant de mettre ce pépin embryonnaire sur le dos du bon dieu plutôt que sur le destin, le pas de chance ou la cruelle nature. Contre cette mauvaise fortune divine, elle s’efforce donc, rétractée dans les draps rêches de faire bonne figure devant l’angelot chétif et croûté d’eczéma. Soyez béni, Seigneur, pour cet avorton qui gigote dans la mangeoire.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Un commentaire ?