mardi 5 novembre 2013

J’ai 11 ans / 13 /



La tierce fraternelle est au complet dans cet avril 60. Faute de place dans nos trois pièces, ma sœur et mon frère ont leur vie dans les remises blanchies de l’ancienne épicerie mitoyenne. Deux chambres rudimentaires dans le bâtiment grossier, bardé de planches goudronnées, collé à l’arrière de la maison et ouvert sur les deux jardins coupés par une allée de terre.
Ma sœur termine ses cinq années d’apprentissage de linotypiste. 5 ans à apprendre à saisir des lignes-blocs, à surveiller la coulée de l’étain-plomb, à ranger les matrices dans le bon magasin de casse. 5 ans, parfois en chantant, à coller, relier, brocher les ouvrages commandés par l’évêché dont c’était l’exclusive imprimerie. 5 ans, dans une bonne ambiance, mais dans un métier, alors élu pour sa seule protection conventionnelle, assurant dès le début ce bon salaire qui offrait, sans discussion, l’indépendance à celle dont on avait sèchement contrarié la volonté de devenir institutrice.
Celle, de neuf ans mon aînée, que je vois, à peine ce métier en poche, faire brutalement ses valises, au début de l’été, pour rejoindre l’institut hélio marin de Pen Bron au Croisic. L’institutrice contrariée allant s’occuper d’enfants et adolescents polyhandicapés, dans ce centre créé à la fin du 19ème pour accueillir les gamins rachitiques…

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