vendredi 10 avril 2009

La naissance des feuilles

Quittant le bateau-livre, en fin d’après-midi, j’ignore quel fil de pensée a étiré notre flânerie vers les allées du Parc Floral, ce large poumon près du lac de Bordeaux.
Dans quelques semaines on se promènera dans un tableau. En ce début d’avril, le premier regard boit un lavis d’hiver juste aquarellé par endroits des premiers rouges des camélias et violets des lilas et rhododendrons.
Mais à l’avancée, dans la roseraie ou le carré aux vignes, l’œil suit encore les traits d’un dessin, lit tout les arrangements de l’espace, avant de s’accrocher au bourgeonnement des bois et percevoir prêtes à fendre toutes ces chrysalides qui libèreront alors, dans une joie animale, fleurs et feuilles.
A ce moment si particulier de la nature en cours d’écriture, la naissance des feuilles nous donne la plus belle émotion. Le corset cède, éclot une aile qui se déplisse, vernie vert clair, duveteuse, ronde, pointue, dentée ou lobée, une plume roulée dans le souffle de la terre. L’arbre à nouveau nous murmure, nous frôle de ses lumières. Le monde à nouveau nous étreint.
Dans ce jardin-livre, en cette fin d’après-midi, notre rêverie filait la pensée d’Alberto Manguel : « A nos débuts les mots nous semblaient occuper non seulement le temps mais aussi l’espace, à la manière de l’eau ou des nuages… »
A la manière de l’arbre qui coud son merveilleux livre des frémissements.

1 commentaire:

  1. merci pour cette promenade, même mise au banc des marcheurs je peux en profiter pleinement.
    la lecture à voix haute donne une émotion toute particulière, la respiration s'accélère, éclosion en mouvement.

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