60% d’abstention aux européennes, 150000 manifestants le 13 juin contre plus d’un million le 1er mai et bien davantage en janvier et mars et pendant ce temps le libéralisme jette 3000 salariés au chômage par jour. Sèche mathématique de l’horreur économique qui broie le cœur. A quel stade de l’enfer explosera la révolte? Peut-on trouver justification dans l’apparente absence de relais politique de rechange ? Sommes-nous à ce point devenus des nains pour attendre reconstruction de notre destin par délégation ?
Dans ces moments de blues, où creuse le désespoir, seule la lampe même vacillante de la poésie apporte un peu de chaleur. Mais il faut aller vers les poètes totem. Bernard Noël né en 1930 en Aubrac en est un, même, si, malgré son impressionnante œuvre poétique, il refuse d’être ainsi qualifié. C’est vrai qu’il est aussi romancier, essayiste, dramaturge, critique d’art. C’est avant tout, grand voyageur, un immense passeur de la langue. Ecrivain de friction, il entend que sa poésie soit la plus juste des traversées de l’œil, qu’elle soit sécrétion, corps projetant sa manière noire. Du corps frotté au monde et aux autres doit surgir la langue la moins manipulée, la plus irréfutable susceptible d’affronter notre nuit. C’est pourquoi la lecture de cet homme d’affrontement et de verticalité redynamise toujours l’esprit de résistance. Alors mâchons longuement ses mots comme : « La révolte rature la mort ».
Aubrac
Neige et brouillard l’enfance a perdu sa route
Un bout de ciel mouillé bouche la fenêtre
Le temps est un trou toujours qui va devant
Piège ouvert trop tôt pour le dernier moment
Plus bas l’hiver se couche dans la lumière
Il n’en reste en l’air qu’un peu de buée blanche
Des souvenirs tombent d’on ne sait quel arbre
Dont la mémoire brise toutes les branches.
Extrait de: "le reste du voyage"
http://www.rue89.com/cabinet-de-lecture/2009/06/16/le-cabinet-de-lecture-a-l-emission-dns-le-texte-pierre-michon-pour-fai
RépondreSupprimerVa voir ça, papa...