Il y peu, un chroniqueur de France Inter évoquait une éventuelle nouvelle tendance culinaire : la cuisine aux insectes, citant un restaurateur de Guidel proposant à sa carte un menu à 15€, apéritif agrémenté de grillons frits, pizza au ténébrion pilé, criquets ou phasmes roulés au chocolat.
Bien sûr, l’entomophagie existe dans bien des pays. Mais imaginer dans la friture le grillon qu’on chatouillait d’un brin d’herbe, qu’on caressait doux et précieux dans la main, qu’on glissait aussi dans sa boite d’allumettes sous le pupitre d’école donne soudain un drôle de goût à mes rires d’enfance. Mais entendre craquer sous la dent ce petit chanteur de nos cheminées et portes, vénérés en Chine ou au Japon, attriste mes petites musiques d’étés dans les coquelicots.
Bien des poètes ont chanté le grillon, Lamartine, Laforgue, Lorca, le merveilleux Rimbaud dans « les effarés » et puis René Char En 1943 dans le maquis :
Hommage et famine
Honneur à vous, femme
Qui vous accordez avec
La bouche du poète, ce torrent
Au limon serein.
(Il faisait nuit. Nous nous étions
Serrés sous le grand chêne de larmes.
Le grillon chanta. Comment savait-il
Solitaire, que la terre, n’allait pas
Mourir, que nous, les enfants sans
Clarté, allions bientôt parler ?)
Il savait.
Le phasme cet étrange insecte caméléon a eu, lui, pour chantre Serge Wellens :
Quelqu’un qui fait tant d’efforts pour ressembler à quelque chose ne peut, à la longue, qu’attirer l’attention.
A la discrétion de la greffe qui le scelle à ce rameau, on connaît que le phasme est fou.
Quand même, se vouloir brindille avec de telles mâchoires !... mais c’est ainsi, le phasme met tout son orgueil à n’avoir l’air de rien et la plupart des prédateurs s’y trompent.
La plupart seulement. Non le feu de broussailles dont la boulimie est aveugle et sans nuances.
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