samedi 30 juin 2012
Dans le jardin de mon père / 17 / l’art premier de papa
C’est la disposition du jardin qui, tous les matins, nous accueille. Nous prend dans mille signes nouveaux, mille points d’appui. Mille métamorphoses écloses dans la nuit. Avec ce frais visage de la beauté accomplie derrière l’attention de nos mains. Il nous offre, alors, la mesure de sa permanence et le baume de ses germinations. Tous les matins le corps s’enfonce dans son mystère quand l’âme se réjouit de chaque pousse et mûrissement. Sa visite nous transfuse, pour la journée, l’énigmatique force de sa plénitude.
Tous les matins papa y avait sa place cosmique. Cette place comme dévolue qu’il a tenu à entretenir de la plus noble façon. Et sa valorisation plastique de ce coin terrestre, quand je ne saurais que resserrer le père nourricier et le citoyen, me permet d’éclairer l’homme intime. Rendre mieux visible la belle sensibilité de son regard.
Car je dois, sans doute, mon éveil pictural à la vision régulière de son jardin. Son ordonnance spatiale et la mise en scène de ses allées, géométrisant chaque planche comme autant de tableaux à la figure parfaite. Ainsi ses cadres de terre fraichement retournée m’ont préparé l’œil au carré noir sur fond blanc de Malevitch. Les cautérisations des semis rapproché de la rigueur cubiste, comme la fusion des explosions dynamiques et colorées, amené à l’émotion de l’abstraction lyrique. Tout l’art premier de papa m’a permis de goûter les pêches de Cézanne comme les folies légumières d’Arcimboldo.
Ce texte, chers fidèles de « grains d’encre », clôture ma première saison 2012. Je vous donne rendez-vous, à nouveau, dans mon jardin de mots le premier Septembre.
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