samedi 23 juin 2012

Dans le jardin de mon père / 15 / Le radis






Je me souviens du demi-long rouge « Pernot » et du rond rose à l’accent cocardier d’un tremblant Maréchal incitant les belles familles terriennes au jardinage : le « National ». Papa revenu de ses cinq années de captivité en ferme autrichienne les sèmera longtemps avant de déchirer délicatement ses premiers sachets de « dix- huit jours ».
Le radis reste, dans ma mémoire, ma première madeleine jardinière. Sans doute parce que papa, avant leur volée et enterrement sous les dents du râteau, me versait parfois dans la main ces chantantes granules blondes. Tout l’art consistant à semer clair mais suffisant en mélangeant à cet effet un peu de sable aux graines.
Et puis, parce que sa gaité toute crue dans l’assiette et son éclatante saveur à la croque-au-sel, comme une sorte de « bon appétit », entamaient avec bonheur nombre de repas. Papa l’alignait régulièrement entre les autres cultures me laissant le plaisir, après quelques semaines, de tirer sur quatre oreilles vertes et velues pour déterrer ce museau de souris pointant le même poil blanc que celui qui poussait au bout du nez de mémé.

Dessin brodé de Lou Sautreau

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