samedi 21 avril 2012

Dans le jardin de mon père / 5 / Tu n’useras pas ton manche.




Si me prenait quelque marotte généalogique, je choisirais d’asseoir ma parentèle dans un châtaignier. Papa, sur la première branche, qui élisait cette rude essence pour le manche de ses outils. Il coupait le bois en hiver, sève retombée et lune descendante. L’écorçait au couteau. Puis le laissait sécher jusqu’au printemps avant de l’ajuster au fer.
Je retourne encore ce bois bien luné, jauni aux endroits des poignes. Je revois ses mains noueuses sur sa douceur de peau. Je caresse les nodosités longuement adoucies par la lame, petites bosses plus brunes. A ces endroits s’embranchent toujours ses gestes et conseils comme :
« N’oublie jamais ton outil dans la terre. Ta tâche finie, rentre-le au sec dans la cabane. Tu n’useras pas ton manche. »
Il aurait pu dire : « ton manche te survivra ».

tableau de "CAMELUS"

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