lundi 9 janvier 2012

RUSTIQUE ET SCORPIONITE

Ce 9 janvier, lors de ses vœux, voilà que François Fillon, visant François Hollande, vient d’alourdir les saillies politiques de deux curieuses expressions : « catastrophisme rustique » et « scorpionite ». Cette dernière contraction inventée résumerait, pour lui, une maladie qui consiste à nous envenimer pour mieux croire au mythe du phénix qui renaît de ses cendres. J’y verrai plutôt le délire verbal d’un politicien qui a trop fumé le caducée non de la paix mais de la guerre électorale.

Le catastrophisme rustique me paraît plus interrogateur et révélateur. Si on voit bien, dans ce temps de grande incertitude, pour celui qui, comme copilote, avalant sinon scorpions quelques couleuvres au passage, a traversé toute la chaotique présidence Sarkosyste, l’intérêt de dénoncer le catastrophisme prétendument véhiculé par le candidat socialiste, on est interpellé par l’accolement de l’adjectif rustique. Bien sûr François hollande, sorti de Rouen pour Neuilly revendique maintenant cette terre corrézienne d’élection attachée à ses semelles énarques et la volonté d’une candidature d’un homme normal. Alors, cette évocation de l’enracinement et des belles valeurs de la terre constitue-t-elle soudainement une tare pour le sarthois qui rêve de conquérir les beaux quartiers parisiens ? Dans ce rustique on entend du rustaud, du balourd, on entend du grossier face à l’urbain, de la France d’en bas face à la France d’en haut. On entend comme un rire entendu dans l’entrechoquement des coupes de bulles et le frottement des Rolex, comme les soubresauts fétides de la morgue financière des pinces-fesses bagousés. Dans ce rustique on sent passer dans tous les os le vent coulis du mépris.

N’en déplaise à ce Rastignac du parachute, Rustique est un adjectif qui recouvre des choses magnifiques. Je pense en autres à Chaissac et sa peinture rustique moderne et tout ce merveilleux courant de la littérature limousine et rustique de Richard Millet à Pierre Michon en passant par Pierre Bergounioux.

Et puisque François Fillon a aussi du sang vendéen et rustique par son père, je lui dédis cet extrait de « La vie simple » du poète rustique Jean Rivière :

« Dans la nudité des chaumes, j’ai passé tout le jour. Entre moissons et semailles, j’erre ainsi tous les ans, ne sachant plus où se trouve la nécessité du travail, ni la nécessité du bonheur. Mais le doute aussi se tait et ce soir je rapporterai un bouquet de pied-d’alouette.

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