samedi 9 novembre 2013
J'ai 11 ans / 14 /
Fin 59, j’ai découvert ce grand frère dont maman nous lisait parfois les lettres, venant de Philippeville, cachetées poste aux armées. Le dimanche, tassé et silencieux près de la cuisinière à charbon, enfoncé encore dans son cauchemar algérien. Celui, qui serrait toujours les dents sur sa guerre au printemps 60 et qui se marierait quelques mois plus tard avec la meilleure amie de ma soeur, m’était comme un personnage de fiction. Un héro mystérieux et lointain qui avait, avant son embarquement à Marseille, remisé une volumineuse malle de bois dans un coin de notre appentis dont le trésor était constitué d’outils précieusement rangés et marqués de ses initiales ainsi que d’une magnifique maquette d’escalier, son chef-d’œuvre.
Ce frère disparu avait fui l’atmosphère familial à mes 5 ans, plaquant la menuiserie de son apprentissage pour rejoindre les compagnons du devoir du tour de France. Allant de patron en patron, de maison en maison, d’Angers à Lyon en passant par Strasbourg et Genève, le pays avait été intronisé aspirant ébéniste, à l’été 56 à Strasbourg, après réception de sa maquette. Sa mobilisation l’empêchera de devenir compagnon. J’étais relié à cet aîné infréquenté par deux autres chefs-d’œuvre : un petit bureau en orme menuisé pour mon quatrième noël et un cheval de bois à bascule chevillé pour mon troisième. Ce dernier livré avec tant d’empressement que je laisserai le fond de ma culotte sur le rouge trop frais de la selle. La mémorable colère paternelle qui s’ensuivra immortalisant l’histoire.
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